ILS IRONT LA NUIT/MARCHER SUR LES TOITS/ET GRINGNOTER LE CIEL

« Entre eux et autour d’eux
Étincelles de bonheur
Comme la rosée du matin
Furtives et éphémères »

« Ce texte est né d’une liberté absolue d’amour et de désir.
Poème rebelle,inaliénable, l’amour fou -car il est toujours fou l’amour- brandi comme flambeau dans l’obscurité des jours actuels. Emportement des sens en énergie de vie qui s’invente et se réinvente à l’infini. Passage vers la lumière, ivresse des jours naissants. Il s’agit alors d’étreindre le monde, le prendre à bras-le-corps, lui faire l’amour, et pousser avec lui comme poussent les fleurs sauvages. »
Emmanuelle Sarrouy

Jacques Flament Éditions, 2021

EXTRAIT

La lune et les étoiles
Pour bercer leurs rêves
Toujours (plus fort)

Un peu plus tard parce qu’il aime la musique des poètes amoureux il dit :
Je rêve que je dors

Parce qu’elle aime se promener dans les rêves amoureux elle lui répond :
Je suis dans ma grotte comme
Dans ton rêve

Parce qu’écrire et rêver est peut-être la même chose
Parce que les grottes et les hôtels sont leurs refuges d’écrivains amoureux
Parce que les hôtels et les grottes sont des passages secrets
Vers ces galaxies insoupçonnées/merveilleuses
Qu’ils ont bien l’intention d’explorer

L’idée naît de la phrase comme le rêve dévie selon les poses d’un dormeur qui se retourne (c’est Cocteau qui cette fois s’était invité)

Elle lui parle du Potomak de Cocteau
Il lui apprend que le Potomac est un fleuve
Qu’avait un jour aimé traverser Kerouac
Avant de rentrer sur Lowell
Sa ville natale

Et voilà que Cocteau rencontre Kerouac
Sur les bords du Potoma/c/k

Une lettre les sépare
Un fleuve les relie
L’écriture les emporte
En phonétique ils se retrouvent
Comme un rendez-vous depuis longtemps pris

Comme quoi
Le Potoma/c/k
Ça crée des liens
(un fluide magique ?/une rivière électrique ?)

C’était arrivé comme ça
Comme une évidence
À la frontière des idées révélées

C’était un peu leur rivière
Leur lieu de rendez-vous
Leur croisée des chemins

LE CŒUR EN SUSPENSION

à toi qui m’entends murmurer

comme une envie de crier
au-delà de l’absence
un chant

Éditions Furtives, 2019 (N°50)

EXTRAIT

et le monde tout autour
enflammé
en révolte
qui hurle
sa révolte
et moi je ne sais pas
comment faire
ça
comment te dire
ça
sans respirer
les mouvements contraires
sans respirer
et le souffle arrêté
sans respirer
et le corps saturé
sans respirer
et les âmes blessées
sans respirer
et les coeurs transpercés
sans respirer
et la force des marées
sans respirer

SÉISME(S)- livre

Il y a dix ans, le 12 janvier 2010, un puissant séisme dévastait Port-au-Prince (Haïti) et faisait disparaître les premiers enfants (Nashka et Yves-Nelson) que nous étions en train d’adopter… Ce séisme nous rapprochait également paradoxalement de nos enfants (Medjina et Joëlsonne), que nous sommes allés chercher le 23 décembre de la même année… Ce séisme dévastatueurconsolidait étrangement nos liens avec cet immense petit pays qui peine à se reconstruire…

Dans les jours qui ont suivi, je me suis aussitôt lancée dans l’écriture de ce texte…

Haïti, 12 janvier 2010. Écrire depuis le tremblement de terre, comme une évidence. La rencontre avec un pays, un peuple, une histoire. Collisions. Au travers de l’aventure tumultueuse et merveilleuse de l’adoption. Ayiti chérie. Un chant s’élève. Au-delà des frontières. Parce que nos enfants sont tombés et qu’il va falloir ensemble se relever. Pour raconter l’histoire. Notre histoire. 

Publié en 2011 aux Éditions Thélès
(avec la collaboration du Conseil Général 13)
Séisme(s) est réédité chez L’atinoir Éditions, en 2019 :

Le livre parle de l’expérience du séisme, vécu dans l’éloignement des enfants que l’on vient de rencontrer quelques mois auparavant. Si loin si proches.

C’est également une histoire de rencontre, une histoire d’amour avec un pays, un peuple, et des enfants formidables. Cette puissante histoire d’amour que nous, parents adoptants, vivons avec ce pays.
Exacerbée depuis le 12 janvier 2010.

Haïti, le pays de naissance de nos enfants, et notre pays d’adoption.

C’est ensuite un témoignage sur l’aventure de l’adoption, ce long parcours semé d’embûches plus ou moins prévisibles…

couverture © Hélène Bez – 2011

Préface de Rodney Saint-Éloi :

« Le livre Séisme(s) a une histoire particulière. Il prend son sens dans une double relation : le deuil d’une mère ayant perdu ses enfants, Yves Nelson et Naschka, au cours du séisme. Et la relation d’Haïti au monde. Car la mère qui pleure ses enfants est d’une autre terre. D’une autre culture. Mais son cri dépasse les frontières géographiques et raciales pour faire écho jusqu’à nous.

Quel bonheur d’occasion que ce livre qui raconte avec élégance une mère qui espère prendre dans ses bras ses enfants, qui les a perdus et qui les a retrouvés, car Emmanuelle Sarrouy-Noguès a refusé la fatalité et a opté pour la vie en rencontrant deux autres enfants Joëlsonne et Medjina qu’elle borde les soirs de pleine lune en leur chantant une berceuse haïtienne : dodo titit, dodo titit. Les premiers enfants ne sont plus, mais la berceuse nous rappelle que la vie est toujours un chant merveilleux. Cette berceuse, je l’entends encore. Elle me fait rêver à un pays beau, avec des enfants qui grandissent comme le maïs, et qui rient comme la mer quand elle est folle, la mer. C’est Mahmoud Darwish qui nous le dit :

« Quels que soient nos différends nous saurons
Que le bonheur est possible tel un séisme. »